Des "Etudes de faisabilité" au "Psychodrame de la gouvernance": Les tribulations d'une plateforme logistique

Publié le par Jean LE DUFF

Note liminaire:

Cet article est très long parce que la question traitée est complexe. Au delà du problème local, la manière dont ce projet a été conduit depuis le début pose en fait un cas d'école: Quelle place et quelle prise en compte réelle du point de vu des citoyens ? Peut-on accepter que les données objectives soient infléchies pour permettre la justification à priori de partis pris politiciens ?
 
 Sur une fin d'étape

Lundi matin se tenait à Domagné une réunion du Syndicat mixte d'étude de la plateforme logistique en projet. Après un an de prolongation ce dernier arrive en fin de vie sans que les problèmes de fond posés par ce projet soient réellement mis sur la table. Rappelons que ce syndicat d'étude regroupe notamment: la Communauté d'agglomération de Vitré, la Communauté de communes de Chateaugiron, le Conseil Général, le Conseil Régional.

 Il est de notoriété publique que tous les participants de ce syndicats d'étude n'ont pas la même conception de ce que doit être cette plateforme, des finalités visées. Ce que nous avons entendu ce matin nous a permis de constater que s'il y a accord dans ce syndicat sur l'opportunité de  réaliser à l'est de Rennes  un outil de traitement multimodal du transport de fret, l'ambiance de ce matin était allourdie par les non-dits et les rivalités occultes.

La question sous jacente mais jamais formalisée, celle pour laquelle chacun a fait effort afin que la réunion ne se termine pas par un clash, était en réalité la suivante: sur quel compromis, les positions divergentes internes au syndicat d'étude peuvent-elles se rencontrer pour que ce dernier puisse transférer le "bébé",  pour l'instant sous assistance respiratoire, à une structure juridique susceptible de l'aider à franchir les obstacles objectifs, qui  parsèment un chemin encore long, vers un aboutissement pour le moins encore très incertain.

C'est à dessein que je m'exprime par cette prase aussi longue. L'accumulation des propositions (au sens grammatical du terme) qu'elle comporte est la l'image  des échanges réthoriques dont les méandres ont jalonnés près d'une heure et demie d'escarmouches verbales. On aurait pu se croire à la Sorbone au temps de François 1er mais, entre gens de bonne compagnie ce ne fut jamais brutal.

Où en sommes nous donc? Une structure juridique pas encore bien définie va être constituée pour encadrer le passage à la réalisation d'un projet dont l'emprise n'est pas encore bien précise, dont le traitement du raccordement de la route au fer est pour le moins dans la brume et qui sera peut-être doté à terme d'un échangeur routier compatible. Dans leur for intérieur certains pensent "facilitons la vie au transport routier", d'autres "aménageons un espace technique rendant possible la captation du fret par le rail",  d'autres encore tente de se rassurer en espérant que des emplois providentiels leur permettront à terme de justifier leur choix actuel.

De façon concrète, cette structure juridique indéfinie devra lancer un processus d'enquête publique pour obtenir la qualification du projet en terme d'utilité publique. Puis elle élaborera un cahier des charges à partir duquel elle sollicitera par concours un aménageur  privé qui devra établir l'avant projet détaillé conduisant à la réalisation d'ouvrages  dont l'utilisation devra être compatible avec les nécessités économiques parce qu'en définitive il faudra bien que quelqu'un paye. Espérons que ce ne sont pas les contribuables qui feront les frais d'un pari aussi hasardeux.

 La réunion de ce matin montre que l'on n'est pas sorti des incohérences sur lesquelles ce projet a été initilement fondé. Le "Collectif pour une qualité de vie à Chateaubourg"  au terme de cette réunion a distribué un document qui souligne le tour de passe-passe par lequel le site de Châteaubourg-Domagné-Servon a été retenu en dépit des données objectives  ( Le projet de plateforme logistique de Châteaubourg-Domagné, ou: Comment on se fait rouler dans la farine) qui militaient en défaveur de ce choix.

Tout d'abord il faut se rappeler que le classement des sites avait été arrêté finalement comme l'indique l'extrait ci- dessous de la plaquette éditée par "Force5" le cartel des chambres consulaires qui a déclanché les premières études:
On constate que la différence entre le site de Châteaubourg et celui de Noyal est de 20 points. L'analyse effectuée sur les documents issus de l'étude Pingat permet met en évidence que pour trois critères objectifs figurant à la fois dans la comparaison établie en mars 2003 et septembre 2003 il y a pour le moins une malhonnêteté intellectuelle.

Reprenons ici les tableaux comparatifs effectués par le collectif:

Analyse multicritères :

Etude Pingat

mars 2003

Site de

Cesson

Domloup

Noyal/Vilaine

Site de Châteaubourg

Domagné

Servon/Vilaine

Observations relatives

Capacité à recevoir

un embranchement fer

0

-

-- très défavorable

- défavorable

0 neutre

+ favorable

++ très favorable

Capacité à recevoir

un chantier de transport combine

++

-

Impact sur l'environnement

--

--


Analyse multicritères : Etude Pingat

septembre 2003

Avec un minimum de logique on peut comprendre que la correspondance entre les 2 systèmes d'évaluation s'établisse selon les équivalences ci-contre

-- &- correspondent à 0

+ correspond à 5

+ + correspond à 10

Capacité à recevoir

un embranchement fer

5

10

Notons au passage le tour de passe-passe statistique qui consiste à réduire la dispersion des notes pour les aspects négatifs. D'emblée cette manipulation réduit la prise en compte des critères pour lesquels le site de Châteaubourg accumulait les évaluations particulièrement négatives

Capacité à recevoir

un chantier de transport combine

10

10

Impact sur l'environnement

0

5


 

Questions

Pour la capacité à recevoir un embranchement fer: Quels sont les éléments objectifs qui justifieraient qu'à un 0 corresponde un 5 quand à un correspond un 10 ?

Pour la capacité à recevoir un chantier de transport combiné: Comment justifie-t-on qu'un - de la première évaluation obtienne dans la seconde évaluation un nombre de point équivalent à un ++ soit 10 points?

Pour l'impact sur l'environnement: Quel est le fait nouveau qui permet de considérer qu'une évaluation --équivalente pour les deux sites en mars 2003 se transforme en septembre en 0 pour Cesson et en 5 pour Châteaubourg ?


Si l'on ajoute à cela que le site de Cesson a été crédité de 0 point en ce qui concerne l'avis des communes alors que le site de Châteaubourg a été crédité de 10 points alors même que les Conseils municipaux ne se sont pas prononcés pousse la manipulation statistique à la hauteur d'une escroquerie.


Lors d'une rencontre récente entre le collectif et le, conseil municipal de Domagné le Maire, Monsieur Renou, s'étonnait du fait que le collectif et en particulier moi-même contestions l'objectivité de l'évaluation qui avait abouti en septembre 2003 à retenir le site de Châteaubourg-Domagné-Servon. J'attends avec sérénité qu'il soit démontré que le raisonnement ci-dessus est faux


Si cette démonstration s'avère impossible et que, malgré tout, les conseillers municipaux des trois communes de Châteaubourg, Domagné et Servon votent en faveur d'un projet dont la localisation est fondée sur des données distordues, ils courent le risque de se voir un jour reprocher par les électeurs d'avoir accepté de couvrir une tromperie. Ils contribueraient aussi à disqualifier le fonctionnement de notre démocratie.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article